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De serial-buteur à distributeur de caviars: Messi, l'inévitable évolution de l'âge?

  /  Sophie

LIGA – Auteur de six passes décisives mais aucun but lors de ses quatre derniers matches, Lionel Messi a amorcé une forme d'évolution. En partie volontaire. Mais aussi sous la contrainte. Voici pourquoi.

Quatre matches sans marquer. Il s'agit là d'une série a priori banale pour un joueur lambda. Mais Lionel Messi, lui, n'avait plus aligné quatre rencontres sans but depuis presque quatre ans. Pour le génial argentin, c'est donc une anomalie.

Est-ce une inquiétude ? L'échantillon est encore trop restreint pour apporter une réponse définitive mais il traduit déjà, assurément, une forme d'évolution. Car sur cette même période, le sextuple Ballon d'Or a trouvé une autre manière d'être décisif. En délivrant six dernières passes.

Depuis le début de la saison, La Pulga a distribué douze passes décisives en Liga. Soit une seule de moins que sur l'ensemble de l'exercice précédent. S'il parvient à garder le rythme, il effacera ses meilleures marques, établies à 18 offrandes en 2010/2011 et 2014/2015.

Cela tombe bien, le Barça en avait besoin

Plusieurs motifs peuvent justifier cette métamorphose. Si Messi a quelque peu délaissé son costume de serial-buteur pour distribuer les caviars, c'est d'abord parce qu'il l'a choisi. "Je pense de moins en moins à marquer, disait-il mi-janvier, lors d'une interview accordée à DAZN. Evidemment, j'aime le faire et si j'ai une chance de marquer, je la saisis. Mais chaque fois que j'entre sur le terrain, je suis moins concentré sur les buts et plus sur le jeu."

L'arrivée de Quique Setién sur le banc catalan est tombée à pic. Le technicien de Santander a débarqué pour retrouver l'ADN du club, peu à peu délaissé après les départs successifs de Xavi, puis Iniesta. Il a ainsi mobilisé une grande partie de l'entrejeu barcelonais pour reconquérir la possession du ballon, conférant toute la responsabilité de la création à l'Argentin. Ce, alors que d'autres éléments à l'aise dans ce domaine, comme Frenkie De Jong ou Antoine Griezmann, n'ont pas été capables d'endosser ce rôle de manière pérenne.

Cette évolution est donc une nécessité technique. Elle pourrait aussi être physique. Messi n'a jamais été un coureur de fond – souvenez-vous de ce Clasico de décembre 2017 où il avait marché sur la pelouse de Santiago-Bernabeu (0-3) durant 83% du temps. Il est devenu ce qu'il est lorsque Pep Guardiola l'a incité à se contenter de sprints courts, mais intenses, pour devenir l'élément déclencheur du tiki-taka.

Messi a fait ce choix mais en avait-il d'autres ?

Mais à bientôt 33 ans, La Pulga est condamnée à se réinventer pour retarder l'inévitable déclin (après tout, il est humain). Son début de saison, où il avait été touché au pied, puis à l'adducteur avant de rechuter à plusieurs reprises, avait sonné l'alerte. S'éloigner de la zone de vérité lui permet aussi de prendre moins de coups.

Cette mutation est une solution mais elle pourrait aussi enclencher un cercle vicieux. "Je sais que les gens parleront beaucoup du moment où je marquerai moins, avait-il admis à DAZN. Cela fait partie du jeu, de l'adaptation à son temps, pour être le meilleur joueur pour soi-même et pour l'équipe."

Messi sait pertinemment qu'en troquant, de la sorte, ses buts pour des passes décisives, il pourrait rogner son rayonnement. Surtout dans une époque où le Ballon d'Or ne se gagne plus par les titres, mais par les chiffres. Et aujourd'hui, même si cela n'est pas forcément très juste, une passe décisive vaut moins qu'un but. La Pulga s'apprête peut-être à se démarquer d'une ère. Celle du tout-statistique. Il l'avait pourtant lui-même enclenchée.